08 mars 2016
Le Grand Dijon mobilise des ressources locales pour mettre en place un système énergétique efficace, intelligent et durable, ce qui devrait favoriser la croissance économique.
Le 1er mars 2016, le parrain de l’Observatoire, Jean-Marie Chevalier, a organisé un atelier autour de responsables d’entreprises, acteurs énergétiques et responsables politiques locaux venus partager leurs expériences et analyses. Il est apparu qu’une gouvernance énergétique décentralisée, comme il en déjà existe en Allemagne, était capable d’insuffler des dynamiques économiques prometteuses.
• Un moment historique pour les territoires et une chance pour l’économie circulaire
La décentralisation énergétique peut être aujourd'hui considérée comme une tendance inscrite dans l'Histoire. Elle est affirmée dans la loi française sur la transition énergétique pour la croissance verte; elle a été exprimée par les villes au moment de la COP 21; elle est facilitée par le mouvement européen de libéralisation des marchés et le développement des nouvelles technologies; elle est enfin poussée par une volonté citoyenne d'intervenir davantage dans la définition du cadre de vie quotidien. Elle se traduit par l'insertion d'un supplément d'intelligence dans les systèmes énergétiques existants; elle va au delà de l'énergie et invite à l'économie circulaire. L'innovation, sous toutes ses formes, est au centre du processus. (Jean-Marie Chevalier, professeur émérite à l’université Paris-Dauphine)
• Se réapproprier son destin énergétique passe par une volonté politique ...
Le premier levier de développement d’un territoire repose sur une prise de conscience et un choix politique clair en matière énergétique et économique. La Communauté urbaine du Grand Dijon souhaitait se réapproprier son destin énergétique et ne plus s’en remettre à des acteurs qui s’occupaient de tout. Il a donc fallu opérer un changement d’attitude : la stratégie énergétique du territoire n’a plus été imposée par le sommet mais par les besoins de la base. (Jean-Patrick Masson, conseiller communautaire du Grand Dijon, délégué au patrimoine à l’environnement et aux réseaux)
• ...et une analyse des besoins du territoire
Devenir acteur oblige un territoire à se poser des questions et à écouter les besoins de ses habitants et usagers. Or, la Communauté urbaine (CU) du Grand Dijon s’est retrouvée face à une demande sociale forte de prise en compte de la précarité énergétique dans de nombreux foyers. C’est ce qui a incité la CU à choisir l’option d’un réseau de chaleur intégrant à 80% de la récupération de chaleur fatale et de la biomasse. (Jean-Patrick Masson, conseiller communautaire du Grand Dijon, délégué au patrimoine à l’environnement et aux réseaux)
• Des partenaires énergétiques pour accompagner les territoires
Pour que la CU s’autonomise sur le plan énergétique, elle a eu besoin de partenaires solides. « Un territoire ne peut rien sans la présence et l’accompagnement d’entreprises spécialisées » affirme Jean-Patrick Masson. En l’occurrence, ce sont les entreprises Dalkia et Coriance qui se sont partagées le territoire pour l’équiper d’un réseau de récupération et de distribution de chaleur.
• Un choix énergétique qui relance l’économie locale
En choisissant de développer un réseau de chaleur principalement alimenté par de la biomasse, la CU a permis à la filière bois, importante dans la région, de prendre de l’envergure. « Nous avons aidé les entreprises à structurer leurs méthodes de fonctionnement » se réjouit Patrick Michel, Directeur Régional du groupe Coriance. Sans compter que le développement de ce réseau de chaleur a nécessité la contribution d’entreprises locales. « Nous avons eu besoin des ressources locales, plomberie, génie civil etc...pour réaliser le projet » explique Hervé Monnin, Responsable Grands Comptes chez Dalkia
• L’échelle territoriale : une importance capitale
L’exemple dijonnais n’est pas exceptionnel. C’est le fruit d’une gouvernance décentralisée qui permet de piloter une politique énergétique tenant compte des ressources locales, des intrants, des usages. (Jean-Marie Chevalier). La France découvre ce que l’Allemagne expérimente depuis plusieurs années déjà et avec succès : en témoigne le dynamisme des Landers qui ont répondu à leurs besoins énergétiques en tenant compte de la réalité globale de leur territoire (David Alexandre, directeur délégué de Tilia).
• Un territoire qui prend son destin en main envoie un message à la fois tonique et rassurant aux investisseurs
L’orientation énergétique prise par le Grand Dijon a envoyé un message fort aux entreprises : un message d’ouverture à la nouveauté et de grande capacité d’accueil aux projets innovants. (Jean-Patrick Masson).
Résultat, le territoire compte beaucoup d’entreprises innovantes. Deux sont venues présenter leur activité au cours de l’atelier.
- Groupe Id’ées :
Leader national au niveau l’insertion économique, le groupe développe des activités qualifiantes et créatrices de main d’œuvre tout en favorisant l’insertion professionnelle. Parmi les 8 entreprises que compte le groupe, il y a Novidem, qui produit le premier isolant fabriqué à partir du recyclage de vieux cartons. Il s’agit d’un produit biosourcé, innovant, produit de l’économie circulaire aux performances techniques, environnementales et sanitaires étonnantes. Pour appliquer ce produit dans les bâtis à rénover et à isoler, l’entreprise investit aussi dans la formation de compagnons. (Christian Marie, responsable des développements industriels chez Groupe Id’ées)
- Infineo Coca Cola Entreprise :
En investissant 8.7 millions d’euros dans Infinéo, Coca-Cola Entreprise a financé l’extension du site de revalorisation des déchets Plastipak Packaging situé à Sainte-Marie-la-Blanche, en Côte-d’Or. La capacité de l’usine a été augmentée de 70%, grâce à l’installation d’une nouvelle ligne de recyclage des bouteilles en plastic. L’usine est désormais en mesure de générer 48 000 tonnes annuelles de Polytéréphtalate d'éthylène (PET) recyclé et de ce fait, la proportion de PET recyclé dans les bouteilles Coca-Cola a pu être portée à 34%.
Parallèlement à son activité de recyclage, Infinéo propose un espace pédagogique, dédié à l’information sur le recyclage et l’économie circulaire des emballages. A l’heure où seuls 50% des conditionnements PET prennent le chemin du tri, Infinéo veut inciter les jeunes à adopter des comportements citoyens, responsables et en harmonie avec la nature. (Alexandra Guyon, Responsable centre Infineo / Coca-Cola Entreprise)
• La dynamique vertueuse d’une stratégie managériale portée sur le respect de l’environnement
L’avenir appartient aux entreprises qui revisitent leurs valeurs et qui y intègrent le respect de l’environnement. Les investisseurs attribueront de plus en plus de valeur économique aux orientations prises par une entreprise pour minorer son impact sur l’environnement, maîtriser son énergie, protéger la santé de ses salariés. (Didier Château, Directeur Associé chez Synergence/Deloitte Developpement Durable)
• Voir global à l’échelle locale
A l’heure de la décentralisation énergétique, les régions doivent composer avec deux notions, apparues au cours de l’atelier. Pour qu’un territoire puisse se réapproprier son énergie, il doit tenir compte d’un ensemble de données géographiques, économiques, démographiques....Bref, développer une vision globale sur ce qui le caractérise.
Deuxième notion capitale : l’identification de solutions locales non délocalisables. (Yves Chevillon, Directeur EDF Commerce Est)
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