Clim'art, la Côte des arts

Clim'art, la Côte des arts

Après avoir fait des portraits géants de ses administrés, « pop artisé » les grands acteurs de la côte viticole, visualisé en grand les accords mets et vins, le petit village de Villars-Fontaine envoie en mission une dizaine d’artistes dans le vignoble de la Côte de Nuits. Clim’Art va élever notre regard sur ces climats d’exception. Du grand art assurément.
Par Dominique Bruillot – Photos : Jean-Luc Petit – En partenariat avec L’Echo des Communes

Clim’Art. Tout est dans le nom. Au moment même où les climats de Bourgogne scellent leur destin avec le patrimoine mondial de l’humanité, dans la dernière ligne droite d’une rude bataille qui devrait, chacun l’espère en tout cas, conduire les spécificités du terroir bourguignon vers la reconnaissance universelle, un petit village (gaulois oserait-on dire !) se distingue par son sens de l’initiative et ses impulsions créatives.


Il est vrai que Villars-Fontaine est porté par un maire atypique. Avant de s’engager sous les couleurs de la République, Pierre Lignier a eu une carrière de management dans le monde artistique. Ceci expliquant cela, du haut des 489 mètres où culmine sa commune, mais aussi au regard de ses racines viticoles à Morey-Saint-Denis, il a accouché d’un festival des arts tout en donnant naissance à une confrérie bachique, la bien nommée confrérie de Saint-Denis.


Avant Clim’Art, qui nous occupe présentement, il y eut Vill’Art. En 2011, sous couvert de l’association éponyme, dans une stratégie dont il a le secret, Pierre Lignier implique ses administrés en les livrant à l’inspiration d’un photographe et d’un peintre. Deux cent cinquante portraits embarquent ainsi un village entier à bord d’une aventure qui ne fait que commencer.


Dès l’année suivante, c’est « De Villars à Villars » : dix-huit villages au doux nom de Villars rendent visite à Villars. En 2013, astucieusement, une centaine de panneaux grand format présentent dans le bourg les portraits retravaillés à la pop art d’autant de figures du vignoble. Vignerons,restaurateurs, tonneliers, journalistes… et politiques : le Who’s Who des climats, de droite comme de gauche, se déplace alors dans les Hautes-Côtes pour s’admirer tout en saluant l’originalité d’une démarche efficacement consensuelle. Certains emporteront leur « trophée » pour l’exposer dans leur local de campagne.


Sonder les mystères du vin Puis vient « Quand Bacchus invite Lucullus » en 2014. Reprenant le principe des grands panneaux et d’un livre soigné qui les immortalise, Vill’Art réinvente une trilogie magique : celle du vigneron, du chef et de l’accord entre met et vin qui les unit. Ce symbole de l’accord parfait attire près de 4 000 visiteurs. Il marque la fin d’une époque pour le festival qui, désormais, s’ouvre sur une démarche une fois encore complètement novatrice et un brin « barrée » pour un si petit village.

 


Clim’art, la Côte des artsCette année, Vill’Art devient donc Clim’Art. Derrière cette mutation assumée, il y a le pari fou de confier la vinification intellectuelle des grands crus et de quelques climats d’exception à une dizaine d’artistes.


Le principe de l’opération est aussi lumineux qu’un tableau de Claude Monet. Les peintres et plasticiens sélectionnés par le jury présidé par Xavier Douroux (codirecteur du Consortium et fondateur de la maison d’édition Les Presses du réel) ont décroché un ticket pour une sorte de résidence artistique, avec l’obligation pour chacun de fournir quatre ou cinq oeuvresgrand format, soutenues par des domaines viticoles mécènes, eux-mêmes choisis parce qu’ils produisent un grand cru. Ces heureux élus ont donc commencé à renifler le terroir, manger un peu de terre s’ils le souhaitent, sonder les mystères du vin au contact de ceux qui le font.


De cette implication sensorielle autant qu’intuitive jailliront une cinquantaine d’oeuvres monumentales de 2 mètres sur 3, qui rendront aussi hommage aux villages de la Côte de Nuits, spontanément associés à l’opération Clim’Art.


Le 3 juillet à Gevrey-Chambertin, ce sera jour de fête. Le trompettiste Thierry Caens lancera officiellement ce festival dans lequel chacun pourra découvrir et apprécier le parcours insolite et assurément curieux des regards que les artistes auront posé sur les pépites bourguignonnes que sont les climats d’exception. Un « circuit initiatique » est même prévu pour cela. Alea jacta est.

 

 

 

 

 

Terre promise


A la fin du mois d’août, l’ensemble de cette production inégalable reviendra au berceau, dans le coeur de Villars tout chamboulé par un programme festivalier sans temps mort : conférences, concerts et banquets (une inévitable tradition chez les peuplades gauloises !) célébreront Clim’Art. Au-delà de l’événement, qui se poursuivra par un « baguenaudage » des oeuvres dans la Bourgogne, l’événement laissera certainement une trace durable, et pas seulement des tableaux accrochés dans les domaines. Parions sur les effets secondaires de la cohabitation entre les artistes et une terre inspirée comme la Côte de Nuits. Parions sur les expositions sauvages (ou pas) que ceux-ci distilleront dans le paysage local. Parions aussi sur l’élévation des esprits qui fera de cette terre promise au patrimoine mondial une terre promise pour l’art.


Pierre Lignier, qui a toujours un coup d’avance, a déjà sa petite idée sur la façon dont les choses vont évoluer. Il pense à la naissance d’un centre d’art, pour « faire une place aux arts plastiques et visuels sur la Côte ». Oui, mais où l’installer ce centre d’art ? A Villars-Fontaine, bien évidemment.


* www.villarsfontaine.fr

 

Clim’art, la Côte des artsDans la côte viticole, on ne présente plus Joyce Delimata.
Les vignes et les caves n’ont aucun secret pour celle
qui a su saisir, c’est même sa marque de fabrique,
la subtilité des nuances d’un grand cru, avec la précision
d’un pantone. Ici, elle sera donc comme « chez elle »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette chronique est extraite du magazine mensuel 

dijon beaune mag