"C’est la démagogie qui l’emporte". Bruno Bethenod ne mâche pas ses mots face aux révolutions législatives induites par la réforme territoriale. Pour lui, ces mesures aboutissent purement et simplement à une négation de l’élu.
Vous étiez en première ligne pour vous opposer, au nom des maires ruraux, à la réforme territoriale. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Bruno Bethenod : « Nous en sommes aujourd'hui au stade de son application et sur le terrain nous en voyons les inconvénients ! La première est le transfert d'autorité des compétences malgré la promesse présidentielle, preuve en est du transfert de compétence d'urbanisme que possède la commune au travers de ses documents d'urbanisme; exemple le PLU qui serait transféré vers le PLUI. Cette compétence passerait donc à l'intercommunalité. d'urbanisme que possédait la commune au travers du PLU (Plan local d'urbanisme) vers le PLUI (Plan local d'urbanisme intercommunal). Nous y reviendrons. La seconde est le type de scrutin ; en 2015, les élections départementales imposeront dans une carte de la Côte-d'Or profondément bouleversée, avec la disparition de fait de la moitié des cantons, un binôme homme/femme pouvant exercer séparément son mandat... Pour une élection législative, par exemple, pourquoi pas ? C'est une élection qui s'est toujours basée sur la population, mais pour des élus qui doivent être en symbiose avec le territoire, comme les élus du conseil général et les sénateurs, c'est une aberration. Un territoire, c'est un bassin de vie, une mémoire, la connaissance de la façon dont les gens s'articulent dans ce territoire, une connaissance des complémentarités entre les territoires : bref, une mémoire de ceux-ci. Avec un découpage uniquement fondé sur le nombre d’habitants, c’est la démagogie qui l’emporte. »
En quoi le PLUI est un handicap pour les maires ?
Bruno Bethenod : « Aujourd'hui, c’est la commune qui édicte ses règles d’urbanisme, cadrées par des règles nationales. Le maire connait son territoire, sait exactement où implanter par exemple une zone pavillonnaire, connait la disposition des habitations les unes par rapport aux autres et en tient compte dans l’élaboration des projets. Le PLUI obligatoire est à ce titre une grave erreur : on enlève aux maires une de leur plus forte prérogative, celle de bâtir l’urbanisme et donc de dessiner le futur de la commune. La communauté de communes est trop loin; la proximité n’est plus là. Le droit de propriété est un droit personnel, on a besoin d’avoir un lien direct avec celui qui ordonne. De plus, je ne comprends pas pourquoi on nous impose aujourd’hui un PLUI puisqu’en 2017, nous devrons nous aligner sur les SCOT (Schéma de cohérence territoriale, ndlr). Un SCOT qui va écrire les grandes lignes de ce que nous voulons pour le territoire… Ce qui pourrait amener plus tard les élus de ce territoire à écrire plus finement leur règle. Une commune qui a des compétences générales mais qui en réalité ne peut les exercer, c’est une coquille vide et une négation de l’élu. En infantilisant les élus, on ne reconnaît pas ce qu’ils ont amené à notre pays depuis deux siècles. L’élu est l’élu du peuple mais s’il est nié, il est déligitimé et c’est une fois encore la porte ouverte aux extrêmes et au populisme. »
Votre position vis-à-vis du cumul des mandats semble avoir évolué…
Bruno Bethenod : « Si vous m’aviez posé la question il y a 4 ou 5 ans, oui j’étais pour. Un député-maire, un sénateur-maire qui pouvait justifier d’un ancrage local pour exercer ses fonctions parlementaires possédait par là-même une légitimité. Mais aujourd’hui ? Quand je vois la qualité des textes votés, cet ancrage local n’a servi à rien sur le plan de la défense communale ou intercommunale. Aujourd’hui, je suis dubitatif et le cumul des mandats ne sert plus qu’à fortifier l’égo de certains. »