« A proximité des sources de la Seine et non loin de Saint-Seine-l’Abbaye, se situe Champagny, petit village de 35 âmes et qui abrite un Musée-Ecole. Ce musée abrite une riche collection de matériel scolaire et pédagogique, où plumes Sergent Major et encre violette font la joie des visiteurs de tout âge lors de la traditionnelle dictée. Le mobilier et les collections constitués par les dons de passionnés, sont de première importance par leur nombre et leur authenticité et témoignent de l’histoire de l’école depuis le début du 19ème siècle. A découvrir en famille pour se replonger dans le temps d’avant ! » écrit Catherine Louis, maire de Val Suzon, Conseillère Départementale, très attachée à cet endroit.
Et les nostalgiques de cette encre violette et des plumes Sergent-Major sont venus en nombre pour une dictée originale et nostalgique, celle du certificat d’études. Trente personnes se sont rangées aux bureaux de bois cirés alors que presque autant attendaient ou repartaient faute de place pour les accueillir.
Jamais on n’avait vu autant de volontaires pour ce que beaucoup, autrefois, considéraient comme le pire des cauchemars. De 5 ans à… disons quelques printemps de plus, chacun s’est appliqué à replier sa feuille pour cacher son nom, anonymat de la correction oblige. Avec plus ou moins de bonheur mais beaucoup de sérieux, il a fallu tremper sa plume dans l’encre lorsque les mots commencèrent à s’égrainer sur un texte de Roger Martin du Gard « Grand’Mère ».
Le temps d'une dictée, on a pris place derrière l'un des pupitres incrustés d'ardoises de cette école de campagne dans le silence et le respect. Même l’orage a choisi de se taire et le petit courant d’air rafraichi comme il le peut les 30 cerveaux et autant de paires de mains qui planchent sans copier !
Au passage un petit problème de calcul mental… 30 paires de mains, cela fait combien de doigts ?
Dehors, il pleuvine et on devise, on se rappelle les maximes scolaires, les cartes géographiques Vidal-Delablache, les cahiers remplis par des générations d'écoliers, la leçon au tableau. Ici tout est resté tel que la dernière institutrice l'avait laissé en fermant l'école en 1954.
A côté, le minuscule logement de fonction comportant une pièce unique est meublé du lit à alcôve et du bureau de l'instituteur Albert Duthu qui forma plusieurs générations d'élèves de 1889 à 1911 ; il fera bientôt office de salle de correction pour 5 amies passionnées par cette école et l'écriture.
De Françoise la journaliste à l’ancienne institutrice du village que beaucoup connurent enfants, une certaine gravité se lit sur les visages et on se demande poliment « ici c’est un demi point ? Et là une faute d’accent, une virgule dictée et oubliée ?
Pendant la correction des copies dont la dictée a été agrémentée d’une série de mots complémentaires quelque peu difficiles à orthographier pour qui ne lit pas, un goûter « comme à l’école » attendait les participants dans le pré voisin.
Et l’on se demande si tussah s’écrit tuhssa, thussa, ou tussa, et d’où sort ce lymphocyte bifide et lui faut-il un ou plusieurs H ? Ou encore combien le maharadjah a pu manger de A ?... de quoi en faire une indigestion !
L’ambiance est bon enfant, les générations se mêlent et on s’impatiente un peu pour savoir qui pourra bien recevoir la coupe du ZERO faute !
Et c’est à Alexia Seguin que revient cet honneur. Alexia qui a aussi une jolie écriture et aucune tache sur sa feuille à carreaux bleus et blancs.
Une école une histoire !
En 1954, la dernière institutrice ferme la classe faute d'un nombre suffisant d'élèves, situation malheureusement courante en milieu rural. L'endroit reste fermé pendant près de 30 ans...
Bien des années plus tard, en revenant dans la commune, elle s’adresse au maire afin d’avoir les clés pour redécouvrir son ancienne école. Surprise, rien n’a bougé. La classe est restée intacte. Elle s’est alors dit que c’était impossible de laisser l’école à l’abandon.
Et puis, un jour, des habitants montent une association, Les Amis de l'école de Champagny, pour préserver et mettre en valeur ce patrimoine. Certains ont d'ailleurs été élèves sur les bancs de l'école. Un retour aux sources, un voyage en enfance pour plus de 5 000 visiteurs par an qui empruntent la route cabossée menant au tout petit village.
Encriers en porcelaine, pupitres de bois, cartes de géographie jaunies, cahiers d'écoliers, livres de conjugaison et d'arithmétique, une estrade, un vieux poêle... depuis 1988 l’école est devenue musée. Un musée unique en France car tout est d’époque et non reconstitué où des bénévoles, anciens enseignants, connaissant le sujet comme une table de mathématiques, se chargent de la visite...
Alors, silence, la leçon commence ...et attention les doigts !
Ecole Musée de Champagny
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