Entre sécheresse et inondation, le changement climatique impacte les territoires et leur relation à l’eau. Comme de nombreuses communautés de communes, Dijon métropole s’est saisie de la question et agit pour réduire ses consommations d’une part et préserver la ressource d’autre part.
« Nous sommes la seule métropole française qui n’est pas traversée par un fleuve. Nous nous situons en tête de bassin » introduit Antoine Hoareau, vice-président de Dijon métropole en charge de l’eau et de l’assainissement, pour poser le contexte du territoire. Cette situation particulière a amené l’ingénieur Henry Darcy à créer le premier réseau d’eau de la ville en France et le deuxième d’Europe en 1840, motivé par des questions de santé publique. Au fil des ans, la ville a cherché à s’approvisionner en eau. Aujourd’hui elle s’appuie sur 12 ressources dont quatre principales : la source du rosoir dans le Val Suzon, utilisée depuis 1903, la source Morcueil aux environs de Fleurey-sur-Ouche, le champ captant Gorget à la Fontaine d’Ouche, depuis les années 30 et enfin, depuis 1933, celui de Poncey-les-Athées et Flammerans. « Nous avons donc deux sources karstiques qui s’alimentent des eaux de pluie et deux sources alluvionnaires qui puisent dans la nappe souterraine. Nous alternons en fonction des saisons. » Grâce à ces ressources, Dijon Métropole avec ses 23 communes, ainsi que 40 communes environnantes allant de Poncey-les-Athées à Sombernon, ne rencontrent aucune difficulté à s’alimenter en eau. « Nous n’avons pas d’inquiétudes majeures mais il y a un véritable enjeu à réduire l’eau consommée. »
Réduire les prélèvements
En 2005, Dijon métropole prélevait 25 millions de mètres cubes annuels. En 2025, la consommation a baissé à 19,5 millions de mètres cubes annuels. Pour obtenir ce résultat, Antoine Hoareau estime que deux leviers comptent. « Le premier concerne la collectivité et passe par l’entretien des réseaux. Sur Dijon métropole, le rendement est passé de 73 à 85 % mais notre objectif est d’atteindre 91 % car la perfection n’est pas réalisable. Un réseau vit et en plus des fuites qui arrivent, il y a les usages de l’eau comme les bornes à incendie. » Le second porte sur la consommation individuelle et passe par la sensibilisation. Là encore, les chiffres sont à la baisse. Une famille de quatre personnes est passée d’une consommation de 120 à 95 mètres cubes entre 2010 et 2025. Pour encourager cette démarche, Antoine Hoareau rappelle que Dijon métropole a distribué des kits Optimo comprenant un pommeau de douche et des embouts de robinet destinés à réduire les consommations.
Rendre l’eau à la terre
Dijon métropole agit à d’autres niveaux. Cela passe notamment, depuis 2019 et la mise en place du PLUI HD, par l’obligation de laisser s’infiltrer les eaux pluviales sur la parcelle. À titre d’exemple, l’élu évoque le nouveau quartier Terrot à Dijon. Entre les immeubles, un espace vert de 12 000 mètres carrés a été conservé et toutes les eaux de pluie s’y dirigent. L’écocité Jardin des maraîchers s’inscrit dans la même démarche. « Pour l’existant, chacun des travaux que nous menons intègre l’infiltration des eaux comme nous l’avons fait pour la place Bossuet en désaccordant les réseaux. » Cette stratégie vise à lutter contre le ruissellement et les inondations comme en a connu le quartier de la Fontaine-d'Ouche en avril 2024, mais aussi à récupérer une eau de pluie utile pour la végétation. D’ailleurs, sur le territoire, les espaces verts sont arrosés par l’eau de pluie.
Buvez la Dijonnaise
À côté de la quantité, la question de la qualité fait aussi partie des priorités de la collectivité quand il s’agit de la ressource en eau. « L’eau est le bien de consommation alimentaire le plus contrôlé, que ce soit par l’ARS ou les délégataires. De nouvelles technologies nous permettent de mieux filtrer l’eau afin de retirer les molécules néfastes. » À Dijon métropole, toutes les communes disposent donc d’une eau en quantité et de qualité, Fénay étant la dernière à être en cours de connexion au réseau.
Pour garder la main sur la question de l’eau, Dijon métropole n’ pas renouvelé le contrat de gestion confié à Suez. En 2021, la collectivité a donc créé une SEMOP, Odivea, pour se réapproprier la gestion de l’eau. Concrètement, la métropole garde 49 % du capital de la société tandis que Suez, qui a gagné le marché, reste majoritaire avec 51 %. « Cela nous apporte une vue exhaustive des flux financiers autour de l’eau et de l’assainissement. Nous avons une gestion publique transparente de l’eau. » Même si l’eau est gratuite, Antoine Hoareau rappelle que la prélever, la potabiliser, la transporter, la distribuer, la récupérer et la traiter a un coût. Sur la métropole, le prix de l’eau avoisine les quatre euros pour 1 000 litres. « De l’eau de source revient à 150 euros les 1 000 litres tandis qu’une eau minérale naturelle grimpe à 400 euros les 1 000 litres. À Dijon métropole, l’eau est de qualité mais demande des investissements, donc ce serait irresponsable de promettre une réduction du prix de l’eau. »
Préserver pour demain
Si l’eau continue de couler aux robinets sur la métropole, Antoine Hoareau n’en est pas moins préoccupé tant par l’allongement des périodes de sécheresse que par les épisodes orageux avec de grandes quantités d’eau sur de courtes périodes provoquant des inondations. Il s’intéresse aussi aux différents usages de l’eau sur le territoire, qu’ils soient agricoles ou industriels. À ce titre, il félicite le système français et sa gouvernance partagée de l’eau. « Tous les usagers sont autour de la table et fixent ensemble les quantités prélevées pour chacun. On privilégie le dialogue. Parfois il y a des situations tendues mais on cherche des solutions et on évite la guerre de l’eau. » Pour inscrire la ressource en eau dans le temps, Antoine Hoareau invite à inventer de nouveaux systèmes pour être résilients et notamment à conserver les eaux de pluie d’orage. « Nous travaillons par exemple sur la zone de Quetigny pour mesurer les volumes d’eau et réfléchir à la façon de la stocker pour la redonner aux agriculteurs vertueux du territoire. » L’eau est un enjeu actuel mais aussi d’avenir pour tout un chacun et demande que nos élus agissent en conséquence.
Nadège Hubert